Communiqué de presse Irak | 26 juin 2024

Irak: Dix ans après l'invasion de l'ÉI, peu de chrétiens de retour à Mossoul

 

 
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En 2014, l'État islamique (ÉI) a conquis Mossoul, la deuxième plus grande ville d'Irak. Parmi les millions de personnes déplacées se trouvait la quasi-totalité de la communauté chrétienne, qui représentait une minorité numériquement importante dans cette ville jusqu’à la fin du 20e siècle. Malgré la libération de l'EI, peu d'entre eux y sont revenus à ce jour, en raison de l’insécurité persistante.
Le mois de juin 2014 est à jamais gravé dans le cœur et la mémoire de millions d'Irakiens. Il s’agit du moment où le groupe terroriste État islamique (ÉI) a pris le contrôle de Mossoul, la deuxième plus grande ville d'Irak et le foyer d'une minorité chrétienne considérable. Des millions de personnes ont pris la fuite, dont environ 10’000 chrétiens.  

Dix ans plus tard, l'ÉI a été chassé de la région depuis longtemps, mais peu de chrétiens retournent dans leur pays, car les pertes et l'insécurité ont laissé des traces profondes depuis lors. Elles sont difficiles à surmonter.

Le nord de l'Irak, patrie des chrétiens depuis des millénaires 

Avant 2003, lorsque le dictateur irakien Saddam Hussein a été renversé, environ 50’000 chrétiens vivaient à Mossoul et environ 300’000 dans toute la plaine de Ninive au nord-ouest du pays. Depuis cette date, la population chrétienne n'a cessé de diminuer, les chrétiens ont été confrontés à une discrimination, une hostilité et une intimidation croissantes et ont quitté la région. Ainsi, les événements dramatiques de juin 2014 ont été la dernière flambée de persécution et de violence contre les chrétiens. 
Le 10 juin, les 1500 combattants de l'ÉI se sont emparés de Mossoul en quelques jours. L'armée irakienne s'est retirée, abandonnant la population à son sort. Les images des combattants de l'ÉI triomphants traversant la ville avec des drapeaux noirs sont restées gravées dans la mémoire de l'opinion publique mondiale. Des millions de personnes, dont de nombreux chrétiens, ont fui la ville avec peu de biens.  

29 juin 2014: Califat islamique 

Le 29 juin, le chef de l'ÉI Abu Bakr Al-Baghdadi a proclamé le califat dans la grande mosquée Al-Nuri. Un ultimatum cruel a été lancé aux quelques chrétiens restants: soit renier leur foi chrétienne et se convertir à l'islam et payer une variation de la djizya (l'impôt de capitation pour les non-musulmans), soit quitter immédiatement la ville en abandonnant tous leurs biens.  

Le père Zakarya, prêtre de l'Église syrienne orthodoxe à Mossoul avant l'invasion de l'ÉI, se souvient de ces jours terribles d’il y a dix ans. Il s'est retiré avec sa famille et six autres familles dans l'église située près du barrage de Mossoul, puis tous ont finalement fui vers Ankawa, près d'Erbil. Entre-temps, l'ÉI avait affiché à Mossoul la liste où figurait les noms des chrétiens qu'ils allaient assassiner.

«Mon nom figurait en tête de liste, suivi de celui de deux autres prêtres qui, comme moi, avaient mis en garde les chrétiens et leur avaient conseillé de fuir. L'ÉI a affiché la liste sur les murs des maisons et des mosquées».
 
Pas d'avenir à Mossoul  

Le règne de la terreur de l'ÉI a duré trois ans, mais les blessures des gens perdurent encore. Peu d'entre eux sont revenus, car les pertes, l'insécurité et les expériences traumatisantes se font encore sentir aujourd'hui pour la plupart. «J'ai un fils de seize ans. Je ne vais pas retourner vivre à Mossoul parce que j'ai peur pour lui. Il n'est peut-être pas blessé physiquement, mais il serait harcelé. Il ne trouverait pas d'amis et cela le démoraliserait psychologiquement.»

Deux églises ont entre-temps été restaurées. Des services religieux sont célébrés et des minibus amènent les chrétiens d'Erbil et des environs à Mossoul. Mais après la messe, ils repartent. Seules une vingtaine de familles sont effectivement revenues s’installer à Mossoul, estime Zakarya. Un couple de son église serait également retourné à Mossoul, car ils ne pouvaient plus se permettre de payer le loyer à Ankawa. «Nos familles ont peur de retourner vivre à Mossoul, surtout si elles ont des jeunes filles», explique-t-il. «Une famille chrétienne avait quelques formalités à remplir en ville. Un employé musulman de l'administration leur a demandé ce qu'ils faisaient à nouveau à Mossoul. De telles remarques font que les chrétiens ne se sentent pas les bienvenus et sont déstabilisés.»

«Nous ne nous sentons pas en sécurité dans cette ville», poursuit le père Zakarya. «Pourquoi? Parce que nos propres voisins nous ont volés, à l'époque. J'avais une maison à Mossoul, comme beaucoup d'autres. Quand nous avons dû fuir en 2014, mes voisins sont entrés dans ma maison et l’ont dévalisée. Dois-je maintenant retourner dans ma maison et frapper à la porte de mes voisins pour leur demander de me rendre mes meubles? Ils nous ont tout pris. Comment pourrions-nous maintenant vivre juste à côté d’eux? Nous n'avons pas d'avenir à Mossoul.»

L’exil: une perspective qui attire la jeune génération

Dix ans après la prise de pouvoir de l'ÉI, les chrétiens d'Irak sont plus que jamais menacés d'extinction. Ils ne trouvent pas de cadre sûr pour reconstruire leur vie. Leurs enfants n'ont guère de perspectives, les blessures causées par la violence, l'expulsion et la perte de proches sont difficiles à surmonter. 300’000 chrétiens vivaient en Irak avant l'ÉI, ils ne sont plus que 154’000 aujourd'hui, beaucoup d'entre eux cherchent des possibilités de quitter définitivement le pays et de se construire une nouvelle vie ailleurs. 

Offrir une alternative à l'exil

«Afin de maintenir l’espoir des chrétiens irakiens, Portes Ouvertes a ouvert avec les églises locales plus de 125 centres d’espoir. Ces centres gèrent des projets socio-économiques, par exemple par la création de petites entreprises, et forment des leaders pour répondre aux besoins post-traumatiques dans les communautés. Nous voulons ainsi encourager les chrétiens à rester dans leur pays, en leur donnant des perspectives d’avenir. Sans ce soutien, encore plus de chrétiens décideraient de quitter le pays», explique Philippe Fonjallaz, directeur de Portes Ouvertes Suisse.

 

 

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