Romanel-s/Lsne, le 10 décembre 2024 - Le monde a été stupéfait le week-end dernier lorsque le visage de la Syrie a changé, apparemment du jour au lendemain. Les rebelles se sont emparés de la capitale, Damas, et l'homme fort de la Syrie, Bachar al-Assad, s'est réfugié en Russie. Aujourd'hui, pour la première fois depuis près de 50 ans, la Syrie ne sera plus dirigée par un Assad.
Une prise de pouvoir éclair
Le 29 novembre, les combattants syriens de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), un groupe d'opposition soutenu par la Turquie, ont atteint le centre d'Alep, la deuxième ville de Syrie. Une semaine plus tard, le 7 décembre, Assad s'est enfui de Damas et les groupes rebelles ont déclaré leur victoire en hissant le nouveau drapeau syrien.
La prise de pouvoir par les rebelles a été très rapide, mais qui sont-ils ? Et que signifie la nouvelle réalité politique pour les chrétiens syriens ?
Qui sont les nouveaux dirigeants de la Syrie ?
Hayat Tahrir al-Sham (le nom du groupe signifie « Organisation pour la libération du Levant ») a débuté en 2011 sous un autre nom de Jabhat al-Nusra, qui était allié à Al-Qaïda. Selon la BBC, ce groupe a été « l'un des plus efficaces et des plus meurtriers des groupes qui se sont opposés au président Assad» au début de la guerre civile syrienne.
En 2016, le groupe a coupé les liens avec Al-Qaïda et s'est rebaptisé en 2017 lorsqu'il a fusionné avec d'autres groupes rebelles. Après que les groupes d'opposition ont été chassés d'Alep en 2016, le HTS contrôlait principalement la zone située à l'ouest d'Alep, autour de la ville d'Idlib. Ils sont soutenus par la Turquie. Ils sont toujours considérés comme une organisation terroriste par les États-Unis, l'Union européenne et le Royaume-Uni.
Le HTS a un programme islamique ; il souhaite depuis longtemps évincer Assad et le Hezbollah, le groupe islamiste libanais soutenu par l'Iran, et instaurer un régime islamique en Syrie. Sous le contrôle du HTS à Idlib, le clergé chrétien n'était et n'est toujours pas autorisé à se promener à l'extérieur en portant des vêtements qui les rendent reconnaissables en tant que prêtres ou pasteurs. Les croix ont été retirées des édifices religieux.
Des signes de tolérance religieuse
Cependant, aucun rapport actuel ne fait état de combattants du HTS menaçant les chrétiens ou d'autres groupes. Les déclarations publiques du groupe suggèrent qu'il tente de se réaffirmer comme tolérant les minorités et respectant les droits de l'homme. Le chef du HTS, Ahmed al-Sharaa (qui portait auparavant un nom d'emprunt, Abu Mohammad al- Jolani), est un homme d'affaires. Il a même déclaré à CNN que le HTS avait «fait tout ce qui était en son pouvoir pour dire publiquement aux chrétiens et aux autres groupes religieux et ethniques qu'ils vivront en sécurité sous son règne ».
«Personne n'a le droit d'effacer un autre groupe », a déclaré M. al-Sharaa à CNN. «Ces sectes ont coexisté dans cette région depuis des centaines d'années, et personne n'a le droit de les éliminer».
La dernière série de lois émanant de la direction du HTS à Damas suggère également qu'il existe un certain espoir pour un islam plus modéré. Ces règles comprennent l'interdiction de la vengeance entre Syriens, la garantie de la liberté d'expression et l'interdiction des restrictions concernant l'habillement des femmes.
«La transition à la tête de l’Etat en Syrie sous la direction du chef du HTS, Ahmed al-Sharaa, a suscité des réactions mitigées », explique Henriette Kats, analyste spécialiste du Moyen-Orient à Portes Ouvertes. «Alors qu'il promet la sécurité et la coexistence pacifique pour toutes les minorités, y compris les chrétiens, des doutes persistent en raison des origines djihadistes du HTS et de ses antécédents en matière de violations des droits de l'homme». Ainsi, l'incertitude demeure.
Heures d’incertitude et d’insécurité pour les chrétiens
Les chrétiens, comme les autres Syriens, ne se sentent pas en sécurité car ils ne savent pas à quoi s'attendre. Ils craignent que le changement de dirigeants ait un impact négatif sur la liberté qu'ils avaient en tant que chrétiens. Mais le principal sentiment des croyants syriens est l'incertitude: il est tout simplement impossible de savoir ce que l'avenir leur réserve. Assad était largement considéré comme un tyran, ce qui explique les scènes de liesses populaires qui ont été largement relayées dans la presse internationale, depuis sa chute.
Mais le remplacement d'un tyran peut s'avérer délicat et conduire à une vacance du pouvoir. C'est ce qui s'est passé en Irak en 2007, lorsque Saddam Hussein a été renversé et qu'un vide de pouvoir a conduit à la montée de l’Etat Islamique. Les chrétiens prient pour que ce phénomène ne se reproduise pas. Un optimisme prudent est donc de mise.
«Pour les chrétiens et les autres minorités, l'avenir reste précaire, car les difficultés passées à Idlib et les craintes que les promesses de respect des droits de l’homme ne soient qu'une tactique pour gagner le soutien initial de l'opinion publique soulèvent des questions quant à la stabilité à long terme», explique Henriette Kats.
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